PAR : Françoise Pillon
Membre du comité de rédaction, Église évangélique baptiste de Paris-Centre

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Rares sont les livres de théologie qui me « font du bien ». Je veux dire par là qu’ils ne sont pas seulement remarquables du point de vue intellectuel mais qu’ils m’enrichissent et me nourrissent spirituellement. Surpris par l’espérance fait partie des exceptions. Sa lecture est jubilatoire. Pourtant, ne vous y méprenez pas. Faisant appel à plusieurs disciplines, il n’est pas d’un abord très facile et nécessite un effort de concentration, crayon en main.

couverture du livre

Pour N.T. Wright, il y a une grande confusion parmi les chrétiens sur ce qu’est « la vie après la mort », « le paradis » ou « le ciel ». Pour beaucoup, en effet, « aller au ciel » semble correspondre à une espèce de prolongation de la vie qui se poursuit dans un futur indéfini, le sort de notre corps étant généralement ignoré. De fait, nous évoquons rarement notre avenir.

L’argument de l’auteur est que notre espérance est fondée sur la résurrection de Jésus.

Attention, il n’est pas en train d’évacuer sa mort. La croix et la résurrection vont ensemble. Toutefois, reconnaissons que nous évoquons bien plus la première que la seconde dans nos cultes, nos études bibliques, nos chants. Il suffit de feuilleter un recueil de cantiques pour s’en convaincre.

Or la résurrection de Jésus a tout changé et N.T. Wright montre en quoi, en explorant ce qu’elle est, en en sondant tous les aspects. Cependant, pour commencer, il dresse le tableau de la manière dont la mort est considérée depuis plusieurs siècles dans notre société contemporaine occidentale, y compris la chrétienté, qui est très imprégnée de la culture ambiante dont il donne de multiples exemples. Selon lui, notre conception d’une mort qui n’est qu’un passage ou, au contraire, une aspiration, influence grandement notre espérance. Puis il aborde la résurrection en elle-même. Il se place sur le terrain historique et exégétique. Que voulait dire ce terme au temps de Jésus ? Si son éventualité paraissait bien peu probable aux Grecs comme aux Juifs, pour tous, il s’agissait d’une nouvelle vie corporelle qui suivrait une mort corporelle. La résurrection de Jésus répond parfaitement à cette description. L’auteur s’attache à relever, dans les récits bibliques de Pâques, les preuves internes de son historicité dans un chapitre particulièrement intéressant. Puis, et c’est là le cœur du livre, il s’emploie à exposer en quoi cette résurrection, qui est bien corporelle, change l’histoire. En effet, en ressuscitant, Jésus condamne la mort annoncée en Genèse 2.17 et qui était devenue, après la chute, le sort de l’humanité. Par sa nouvelle vie, il inaugure, ici-bas, une terre et un ciel restaurés, une nouvelle création. Il insiste beaucoup sur le fait que la rédemption qu’il opère ainsi ne concerne pas uniquement l’individu, le croyant, mais tout le cosmos. Au commencement Dieu a créé toutes choses bonnes et même très bonnes quand il s’agit de l’humain. Par la mort et la résurrection de Jésus, celui par qui il a créé, il recrée à nouveau, mais cette fois, le Divin a fait irruption dans cette création. Tout en ayant été élevé à la droite du Père, Jésus est resté pleinement humain et a commencé à régner, même si nous ne ressentons pas sa présence. C’est comme si les deux espaces du ciel et de la terre se rejoignaient déjà avant que le règne de Jésus soit pleinement réalisé.

Cette perspective transforme tout ! Ainsi, c’est le fait que Jésus soit ressuscité, prémices de notre propre résurrection, corporelle elle aussi, qui motive les Apôtres à annoncer le royaume. Et c’est aussi ce qui doit nous inspirer pour la mission, notre action actuelle dans le monde, notre pratique de la justice, notre adoration. Jésus règne déjà dans ce monde nouveau et il nous appartient d’y travailler avec lui.

Précisons que l’auteur est anglican. De ce fait, certains pourront être déroutés par la référence qu’il fait aux sacrements et à la liturgie. Par ailleurs, il est l’auteur de beaucoup d’ouvrages auxquels il renvoie régulièrement, ce qui est parfois agaçant. Enfin, il puise des exemples dans la littérature et l’art britanniques que nous connaissons souvent mal ; tout reste passionnant.


Surpris par l’espérance, N.T. Wright, Excelsis, collection Sel et lumière, 431 pages, 24 €

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février 2021

Rubrique :
Qu'en penser
Mots-clés :
Association baptiste

L’Église évangélique baptiste « La Bonne Nouvelle » de Dijon

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