PAR : Nordine Salmi
Pasteur à la retraite, Église protestante baptiste de Thonon-les-Bains

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Point de vue
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La dernière tentation du Christ

« Résistez » ! Ce mot, gravé par Marie Durand sur la margelle du puit de la tour de Constance d’Aigues-Mortes, dit tout du combat que cette adolescente a dû livrer pour ne pas céder à la tentation. Celle d’abjurer pour retrouver sa liberté. Combien de temps a-t-elle mis pour gratter la pierre et faire en sorte que les lettres s’y incrustent profondément et laissent une trace claire pour celles qui, dans cette prison, lui succéderont ?

Il lui suffisait de prononcer un mot, ou plutôt une phrase, pour que son sort soit changé. En effet, de « résistez ! » à « reniez ! », il n’y a que quelques lettres de différence. Mais quelle différence !

Marie Durand s’est-elle souvenue de Jésus son Seigneur qui, lui aussi, a dû « résister » ? Elle savait, sans doute, que son propre combat, aussi terrible qu’il fut, n’était rien au regard de celui livré par son maître.

Le désert, le jardin de Gethsémané sont, parmi d’autres, les lieux où se sont déroulés les combats les plus difficiles du Christ. Pourtant, il en est un autre, sans doute le plus décisif et le plus effroyable : celui mené à Golgotha. Notre Seigneur gît sur le bois de la croix. Objet de dérision, d’expériences sadiques, il est livré à une foule en délire. De toute part fusent des propos injurieux, des injonctions en forme de défi : « Il s’est confié en Dieu ; que Dieu le délivre maintenant, s’il l’aime… Sauve-toi toi-même, si tu es le Fils de Dieu… ! »

« Résistez ! » Il fallait résister ! C’était si simple d’abdiquer, de renoncer. Tout l’encourage à le faire. La phrase la plus pénétrante dans cette situation est sans doute celle-ci : « Descends de la croix ! Montre que tu es le Fils de Dieu ! » « Descendre de la croix », cette injonction n’est-elle pas la dernière et ultime tentation du Christ ?

Descendre de la croix était largement à sa portée. N’avait-il pas déjà démontré sa capacité à maîtriser les éléments déchainés ? N’avait-il pas déjà subjugué ses disciples en faisant, avec trois fois rien, un festin pour des centaines de personnes. Descendre de la croix aurait été pour lui d’une banalité déconcertante. De surcroît, il aurait cloué le bec à plus d’un. Il aurait aussi, et ce n’est pas la moindre des choses, mis un terme à ses effroyables souffrances. Ç’eut été si simple et tellement moins coûteux pour lui.

Tension extrême entre abandonner et poursuivre jusqu’au bout ! « Père délivre moi de cette heure ! » avait-il prié quelques heures plus tôt. La réponse du Père, il la vivait, dans cet instant ultime. Elle s’accomplissait dans sa chair !

« Résistez », ce « mot » il l’a écrit si profondément dans l’histoire de l’humanité, qu’aujourd’hui encore il nous bouleverse. Il nous remue jusqu’au plus profond de nos lâchetés et de nos abandons.

À Golgotha, notre Seigneur Jésus a résisté jusqu’au bout, par fidélité à son Père mais aussi par fidélité à notre égard pour que nos « résistances » soient non seulement possibles mais jamais vaines.

Article paru dans :

mars 2022

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