PAR : Thierry Huser
Président du conseil de l’Association, pasteur, Église de La Bonne Nouvelle, Colmar

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Société
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« Au Bengladesh, c’est l’apocalypse pour les ouvrières du textile. » Ce titre d’un article paru dans le journal allemand Der Spiegel m’arrête lorsque je le découvre dans la sélection du Courrier International que je reçois chaque jour (21/04/2020). La lecture de l’article me bouleverse et me consterne.

femme

Que découvre-t-on ? Que nos grandes marques de vêtements – Zara, H&M, C&A et d’autres moins connues en France – se comportent de manière inqualifiable à l’égard des entreprises et des ouvriers qu’elles sous-traitent dans les pays du sud-est asiatique. Du jour au lendemain, toutes les commandes sont annulées. Les produits déjà fabriqués (vingt mille jeans pour certaines entreprises) ne « doivent pas être expédiés pour l’instant » – et donc, bien entendu, ne sont pas à la charge de nos prospères multinationales alors que les entreprises locales doivent, par contrat, faire l’avance du prix du tissu, et que les ouvriers ont déjà effectué tout le travail. Lorsque les entreprises se tournent vers les banques, elles essuient des refus. Le premier week-end d’avril, les annulations et les abandons de commandes touchaient déjà plus de mille cent usines, concernant un million de travailleurs du textile.

textiles

Au Bengladesh, chaque salarié fait vivre en moyenne cinq personnes. Aucune mesure de chômage partiel. Les conditions de vie des employées qui vivent à proximité de leurs usines les exposent de plein fouet à la pandémie. La situation est « apocalyptique », déclare la présidente de l’Association des fabricants et exportateurs de vêtements du Bangladesh. Elle implore les grands fournisseurs occidentaux de ne pas les laisser tomber et d’au moins réceptionner ce qui a déjà été fabriqué.

Nos « marques » ont fait des effets de manche sur la production durable, la responsabilité sociale, des salaires permettant de vivre dignement. Zara a fait imprimer le mot « respect » sur un sweat-shirt à capuche dit « durable ». Cela leur a valu des profits importants ces dernières années « et maintenant ils oublient les gens auxquels ils les doivent ». Un entrepreneur bengali du prêt-à-porter confie : « Il y a des usines qui produisent depuis des décennies pour C&A. Pour les gens d’ici, ça a été un coup au cœur. »

On peut, bien sûr, à la lecture de telles réalités, « remercier le Seigneur pour nos conditions de vie tellement plus favorables ». On peut aussi, par fatalisme, déplorer les effets en chaine d’une crise à laquelle nous ne pouvons rien. Pour ma part, cela m’a ouvert les yeux : nous ne pouvons pas nous cantonner à une approche de la pandémie centrée sur les inconvénients de notre petit confinement, somme toute bien protégé. La solidarité s’impose à l’égard de toutes ces personnes, à la dignité humaine entière, dans des situations tellement moins favorables. Merci au SEL et à toutes les associations qui ont ce souci, et nous permettent d’y prendre part, autrement qu’avec des paroles creuses !


SEL : Service d’entraide et de liaison, association protestante de solidarité internationale, selfrance.org.

Article paru dans :

mai 2020

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Églises

L'Église protestante baptiste de Fléron-Soumagne

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