PAR : Christian Baugé
Secrétaire de rédaction, Église protestante évangélique d’Ozoir-la-Ferrière.

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Ma foi au jour le jour
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Le gîte que nous avions loué, à Sainte Croix en Suisse, possédait un poulailler. Le propriétaire mettait chaque jour sur le trottoir ses œufs à disposition de ses voisins qui se servaient et mettaient l’argent dans une boite. J’ai vu la même chose dans un village du Massachussetts où, devant chez lui, un jardinier disposait ses fruits et légumes sur une table, avec les prix au kilo, une balance et une boite où on pouvait même se rendre la monnaie.

Elévé dans la banlieue parisienne, j’ai été interpellé par cette façon de procéder. Faire confiance à des inconnus ? Se serviront-ils sans payer ? Emporteront-ils la caisse, la balance ?

Quelques temps plus tard, mon potager ayant produit plus que de coutume, je me suis avisé de reproduire ces modèles, devant la grille de mon jardin. J’ai tout de même attaché avec une chaine ma table de jardin où j’ai disposé mes salades et légumes avec la mention « GRATUIT - SERVEZ-VOUS ». Et que croyez-vous qu’il advint ? Pendant plusieurs jours, tout est resté sur la table. Personne n’a rien pris.

panier de légumes

L’année suivante, j’ai changé de stratégie. J’ai fait la même chose en affichant cette fois un prix à l’unité et en disposant une boite avec une fente pour l’argent. Je n’ai tout de même pas osé mettre une balance !

Rapidement, les légumes ont trouvé preneurs et la boite se remplissait de monnaie. Le prix demandé était bien sûr tout à fait symbolique.

Aujourd’hui, je sais comment procéder pour partager mes plants de fleurs, mes légumes et mes salades. Il faut mettre un prix. Ce qui est gratuit ne fonctionne pas.

Ma réflexion sur le « don gratuit » ne s’est pas faite attendre. Sans compter d’autres pratiques, est-ce pour cela que les fidèles montent les marches des basiliques à genoux pour mériter le pardon de Dieu ? Est-ce pour cela que la vente des indulgences n’a scandalisé personne à l’exception des Réformateurs ? Le don gratuit du salut en Jésus-Christ serait-il, lui aussi, difficile à « vendre » ?

Il m’est revenu en mémoire ces versets : « Vous tous qui avez soif, venez aux eaux même celui qui n’a pas d’argent ! Venez, achetez et mangez, venez acheter du vin et du lait, sans argent, sans rien payer ! » (Es 55.1 ). Et encore : « Car c’est pas grâce que vous êtes sauvés, par le moyen de la foi. Et cela ne vient pas de vous, c’est le don de Dieu. Ce n’est pas par les œuvres, afin que personne ne se glorifie. » (Ep 2.8, 9). Et enfin : « Que celui qui a soif vienne ; que celui qui veut, prenne de l’eau de la vie, gratuitement. » (Ap 22.17).

Cette année, il faudra que j’essaie de persuader mes voisins que quelqu’un a déjà payé pour eux et qu’ils peuvent se servir gratuitement. Reste à trouver le court message à afficher, à la craie, sur ma table de maraîcher.

Article paru dans :

mai 2022

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