PAR : Jean-Marc Bellefleur
Membre du comité de rédaction, pasteur, Église de La Bonne Nouvelle, Mulhouse, Église La Bonne Nouvelle, St-Louis

Article paru dans :
Rubrique :
Société
Mots-clés :

Le dimanche, nous chantons à gorge déployée que Jésus est notre roi, que nous lui vouons allégeance, par-dessus toute autre chose. Et nous avons bien raison, Jésus est roi.

Et dès le lundi, nous nous comportons comme des citoyens soumis à la République, aux lois, aux règles de notre pays, sans trop parler de Jésus comme roi.

Comment faut-il interpréter ce changement de posture ? Les personnes qui écoutent nos cultes n’ont-elles pas matière à s’inquiéter d’un état d’esprit rebelle à la République, d’une citoyenneté hypocrite ?

statue de Marianne

Peut-être qu’en passant du dimanche au lundi, certains d’entre nous changent de monde. Ils sont passés de l'Église à la société. Ils sont ainsi des gens des deux mondes à la fois, étant tellement « sans loi » avec les « sans loi » – je cite la description que Paul fait (1Co 9) de son art de l’adaptation en tant que témoin du Christ – qu’ils ne sont plus eux-mêmes. Et surtout, ils ne sont sujets du Christ qu’une fois par semaine. C’est peu. Imaginerions-nous l’avenir éternel avec cette intermittence ?

Ou alors menons-nous double-jeu, à dissimuler consciemment à la République notre allégeance à Jésus ? Je ne dis pas qu’il faille placarder notre foi partout ou en faire un leitmotiv lancinant pour nos collègues ou nos amis, certes. Peut-être encore avons-nous peur d’être pris pour des illuminés ou des fanatiques, alors nous cachons notre foi. En contexte de persécution, cela peut se comprendre, c’est vrai. Comme posture générale, cela pose un certain nombre de questions difficiles face à la Bible. Jésus nous a demandé d’être ses témoins (Ac 1.8) !

Ou encore nous considérerions-nous comme en mission secrète pour le Roi, dans le territoire de la République ? Nous serions alors des « agents secrets » du Royaume de Jésus. C’est ainsi d’ailleurs que dans des pays sous dictature, on accuse les chrétiens, en remplaçant « Royaume de Jésus » par « Occident », ce qui n’est vraiment pas la même chose. Cela correspond à vrai dire à la situation de nombreux missionnaires dans les pays sans liberté religieuse. Ils recherchent le bien, n’espionnent pour personne, ne fomentent aucune révolte mais ne peuvent pas dire pourquoi ils sont vraiment là, à savoir l’Évangile. Toutefois, encore une fois, comme posture générale, cela pose des questions insolubles.

Autant appeler un chat un chat. Nous sommes sujets du Roi. Nous devons tout à Jésus qui nous a libérés du péché, qui nous accueille dans son peuple « transnational », l'Église et nous prépare une place dans la maison du Père pour l’éternité. Et soyons francs : en tant que chrétiens, nous obéissons d’abord aux lois de Jésus avant d’obéir à celles de la République. Voilà, c’est dit !

statue de Christ

Pourtant, attention ! La loi de Jésus est de se soumettre aux lois du pays, même si Jésus a gardé sa liberté de parole et de provocation. Aucune sédition, aucune violence. Paul a aussi clairement enseigné cette soumission (Rm 13.1). Pierre aussi, en précisant d’ailleurs que la soumission est « à cause du Seigneur » (1 Pi 2.13). C’est très simple : pas de conflit de loyauté !

Cela n’a rien de naïf. L'Église de Jésus est née dans un contexte politique compliqué et oppressant, bien plus que le nôtre. Jésus, Pierre ou Paul ne l’ont pas ignoré lorsqu’ils exhortaient à se soumettre aux lois : peine de mort, esclavage, mœurs dissolues, culte de l’empereur, et j’en passe. La position des chrétiens était très délicate ! Il fallait réfléchir, peser, comprendre, pour définir une attitude juste. Aujourd’hui, c’est pareil.

D’ailleurs, Jésus avait bien précisé à Pilate, lors de sa comparution, que son royaume n’était pas de ce monde (Jn 18.36). Tout est dit : nous, disciples de Jésus, n’allons pas tenter d’établir un règne politique de Jésus, nous n’allons pas renverser les lois de nos pays pour établir celles de Jésus. Jésus lui-même le fera, à la fin des temps. Il n’a pas besoin de nos épées.

Il faut cependant s’arrêter sur la phrase dite par quelques apôtres devant le tribunal juif qui leur interdisait de parler de Jésus : « Il faut obéir à Dieu plutôt qu’aux hommes. » (Ac 5.29). Dans notre esprit, il y a place pour de la désobéissance civile ! En l’occurrence, l’interdiction d’être témoin de Jésus, autrement dit la négation de la liberté d’expression. Il y aurait d’autres exemples. Mais attention, ne prétextons pas cette obéissance à Dieu plutôt qu’aux hommes pour faire preuve d’imprudence, de maladresse, d’attitudes abusives ou outrageuses !

Soyons avant tout témoins de l’amour de Dieu.

Article paru dans :

octobre 2021

Rubrique :
Société
Mots-clés :
Association baptiste

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