PAR : Nordine Salmi
Pasteur à la retraite, membre du comité de rédaction, Église protestante baptiste de Thonon-les-Bains

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Le congrès vient de sceller l’inscription de la loi sur le droit à l’avortement dans la constitution française. L’évènement a été salué par des manifestations surréalistes. La tour Eiffel, elle-même, a été illuminée à cette occasion.

Que nous disent, entre autres, ces foules en liesse ? Elles racontent le glissement de l’esprit et de la nature de cette loi. Hier, nous étions préoccupés par la santé physique, mentale et matérielle des femmes dans le désespoir.

Aujourd’hui, le sujet est devenu idéologique, voire politique. J’en veux pour preuve le décalage immense entre l’esprit de la loi, telle qu’elle a été présentée par Simone Veil, et l’état d’esprit dans lequel la constitutionnalisation de cette loi a été reçue. En 1974, les propos de la ministre étaient graves(*). L’oratrice était consciente des responsabilités et des dérives qu’une telle décision pouvait provoquer. Elle considérait l’avortement comme « un échec » et « un drame ». La loi avait été conçue pour encadrer cet acte de désespoir. « … C’est pour la contrôler et, autant que possible, en dissuader la femme », déclarait-elle dans son discours. Plus loin encore, écartant la possibilité d’un remboursement de cette intervention, sauf pour les plus démunies, elle affirmait : « … il nous a paru nécessaire de souligner la gravité d’un acte qui doit rester exceptionnel… »

Soyons clairs ! Il fallait une loi pour que cessent les drames et les injustices et mettre un terme à une hypocrisie généralisée. Elle me paraissait équilibrée au regard d’une éthique qui prend en compte la nature pécheresse de l’humanité. Qu’en est-il de l’esprit de cette loi et même de sa nature ? Où sont les mesures d’accompagnement qui permettent à cet acte de devenir « exceptionnel » ? Qu’a-t-on mis en face pour offrir une vraie alternative à ce « drame » pour qu’il ne devienne pas une option mais le dernier recours ? Un discours de « dissuasion » est-il possible, aujourd’hui, sans risquer l’anathème ? Pourrions-nous parler d’un « échec », d’un « drame » sans que nous soyons taxés d’extrémistes religieux culpabilisateurs ?

Dans quel marbre a-t-on inscrit cette loi ? Celui de la tombe de la conscience humaine qui prolonge sans cesse les limites du délai qui rend possible l’avortement ? La conscience, c’est cette partie de nous-mêmes qui fait notre humanité. Certains, aujourd’hui, souhaiteraient la museler, à tout prix, jusque dans les cabinets médicaux.

Oui, je dois l’avouer, je n’étais pas sur le même mode que la foule réunie au pied de la tour Eiffel ou sur la place du Trocadéro. Je songeais à Simone Veil. Elle terminait son discours par ces mots pleins (trop ?) d’optimisme : « Mais cette jeunesse est courageuse, capable d’enthousiasme et de sacrifices comme les autres. Sachons lui faire confiance pour conserver à la vie sa valeur suprême. »

Je ne suis pas certain que Madame Weil aurait rejoint la foule en liesse, sans renier l’esprit de son discours. Mais ce n’est là qu’un point de vue, en l’occurrence le mien.

(*) Assemblée Nationale le 26 novembre 1974

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avril 2024

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