PAR : Nordine Salmi
Pasteur à la retraite, membre du comité de rédaction, Église protestante baptiste de Thonon-les-Bains

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Sois fort ! Nous intime-t-on. C’est à cela que notre société – parfois nos Églises – nous appelle à être ou à devenir ! Ce monde n’est pas fait pour les faibles. Il est construit pour ceux qui sont performants ! Pour ceux qui sans cesse repoussent leurs limites. Pour exister dans ce monde, il faut montrer ses muscles ! La raison du plus fort est, semble-t-il, toujours la meilleure ! Le poète paraît avoir eu raison.

Qu’en est-il des faibles ? Ceux que la conscience de leurs limites et de leurs faiblesses paralyse, tant ils sentent que cet univers de body builders n’est pas fait pour eux. Ils ont beau bander les muscles, rien ne surgit, sinon une vague forme de biceps. Les faibles sont-ils appelés à devenir forts ou à disparaitre ?

La faiblesse a des origines différentes. Elle est liée, de manière générale, à notre condition humaine. Quels que soient nos possibilités, celles-ci resteront limitées. Mes capacités physiques, morales ou intellectuelles se confronteront tôt ou tard à un mur contre lequel immanquablement elles se heurteront. Reconnaitre ses faiblesses constitue une forme d’intelligence, d’humilité et donc un atout non-négligeable. Cela nous évite des déconvenues dont il est, parfois, difficile de nous relever. Dans ce contexte, il ne s’agit pas de nous contenter du statuquo. Comme il est dit quelque part, « le dépassement n’est pas interdit ». Toutefois, c’est loin d’être un impératif constant et pour tout.

La faiblesse peut trouver sa cause dans un évènement spécifique. Une maladie, par exemple, qui limite mon action. Une fragilité psychologique qui m’invite à la prudence relationnelle. Et puis, il y a la faiblesse, amenée par un péché particulier, récurrent. Je devrais, sur ce point spécifique, apporter une attention particulière. Dans tous ces domaines, « jouer les forts » conduit à des catastrophes, parfois dramatiques. La honte, souvent illégitime, peut nous pousser au déni de notre faiblesse.

L’Écriture nous invite à porter un autre regard sur la faiblesse humaine. Il est instructif de constater que la plupart des psaumes sont des appels au secours adressés à l’Éternel. Là, la faiblesse s’exprime sans fard.

Oui, heureux ceux qui se savent faibles car ils verront l’action de Dieu se manifester dans leur faiblesse. Dans mon récent accident de santé qui m’a conduit à une fragilité extrême, j’ai vu dans le regard du personnel hospitalier le regard de Dieu, son accueil bienveillant, sa patience. Oui, j’ai vu, comme rarement, la présence de Dieu au cœur de ma faiblesse, faiblesse que je ne pouvais que reconnaitre.

Heureux ceux qui se savent faibles et qui le crient à Celui qui, seul, est le tout-puissant. Dieu nous connaît parfaitement et se plaît à agir dans la réalité de notre fragilité. Ces faibles-là n’ont pas fini d’être connectés au Dieu de la Vie.

« C’est dans la faiblesse que ma puissance se manifeste pleinement. » (2Co 12.9).

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octobre 2023

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