PAR : Pierre Perrot
Pasteur à la retraite, Église baptiste de Moutier

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À Bible ouverte
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Dans votre Bible : 1 samuel 1–7

Une période bousculée, difficile. Et toujours ce terrible ennemi : les Philistins. Le début des livres de Samuel est aussi la conclusion de l’époque des Juges. Et c’est à grands traits que nous parcourrons les chapitres 1 à 7 de 1 Samuel, en glanant différents éléments comme autant d’invitations à méditer à nouveau l’ensemble de ces textes.

Pour planter le décor, trois parallèles me frappent dans ces chapitres. Tout d’abord, la section commence par des soupirs et des gémissements et sa fin est également amorcée par des soupirs et des gémissements. Ceux d’une femme : « Je me répandais (j’épanchais mon âme) devant le Seigneur. » (1S 1.15-16). Et ceux du peuple de Dieu : « Toute la maison d’Israël soupira après le Seigneur. » (1S 7.2). Dans les mêmes passages, cet ensemble est marqué par la prière. Celle de cette même femme : « Anne se mit à prier le Seigneur. » (1S 1.10). Et celle d’un homme : « Rassemblez Israël et je prierai pour vous. » (1S 7.5,9). Troisièmement, deux noms propres, en hébreu, font écho à une évolution au fil du passage. Au chapitre 4, une femme agonisante s’écrie : « Ikabod – plus de gloire – la gloire est bannie ! » (1S 4.21). Au dernier chapitre, un homme dresse une pierre : « Eben-Ezer, Pierre du secours – c’est jusqu’ici que le Seigneur nous a secourus. » (1S 7.12).

Une femme pleure, une femme prie (chapitre 1)

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Anne est dévastée. Anne est stérile. Anne pleure. Anne est pleine d’amertume… Mais elle prie. Elle veut un enfant. Et elle fait ce vœu au Seigneur : « Si tu me donnes un fils, alors je te le redonnerai pour toute sa vie. » (1.11). « Seigneur, si tu me donnes, je te redonne… » Et puis… j’oublie ? Non, Anne sera conséquente avec cette prière. Elle reçoit ce petit enfant. Une fois sevré, elle le redonne au Seigneur. Samuel est placé à Silo, auprès du prêtre Héli. Mesurons-nous bien la portée de nos prières ? Dieu répond fidèlement. Serons-nous fidèles à nos paroles nous aussi ?

Anne est mal comprise, on la prend pour une femme qui cuve son vin ! Mais elle explique : « C’est par excès de peine et d’affronts que j’ai parlé. » (1.16). Héli répond simplement : « Va en paix ! » Et que se passe-t-il ? « Anne alla son chemin, elle mangea et son visage ne fut plus le même. » (1.18). Remarquable changement : le fardeau est déposé, le combat est terminé, elle a tout remis entre les mains de Dieu. Elle n’est même pas encore enceinte. Mais, elle ne pleure plus, elle ne gémit plus. Il y a un temps pour tout. Son temps est maintenant le temps de Dieu.

Relever la tête, sécher les larmes, attendre avec confiance les clartés de Dieu, son action souveraine. Quelle force de la prière ! (voir aussi Ps 55.23 ; 81.7 ; 1P 5.7). Avec sa servante qui se confie en lui, Dieu se prépare un grand homme dans l’histoire d’Israël !

Dieu dans une boîte ? (chapitre 4)

Dans ce temps-là, nous l’apprenons, tout va mal pour Israël. Ses ennemis, les Philistins, frappent un grand coup. Et Israël est battu. C’est la désolation dans le camp de Dieu, une terrible défaite, au lieudit Eben-Ezer, qui peut-être ne portait pas encore ce nom (4.1, 7.12). Et dans ces moments-là, bien sûr, vient cette question : « Pourquoi Dieu nous a-t-il fait battre par les Philistins ? » (4.3).

Mais le peuple de Dieu trouve une solution merveilleuse : « Allons chercher l’arche de l’alliance. » (4.3). Le coffre sacré ! Dans le coffre, les tables de l’alliance. L’arche, le symbole de la présence de Dieu parmi son peuple ! « Vite, amenons Dieu au milieu du peuple ». Une immense acclamation. Le peuple exulte, la terre tremble. Le courage revient. « Dieu est parmi nous ! Tout va changer, Dieu est là. » Les Philistins entendent cette clameur : « Malheur à nous, Dieu est arrivé au camp, lui qui a frappé l’Egypte ! » (4.8). « Courage, Philistins, combattons ! » (4.9). « L’arche de l’alliance fut prise. » (4.11). Beaucoup d’Israélites meurent. Les fils d’Héli, les deux prêtres, sont tués ! Superstition quand tu nous tiens ! Héli meurt en apprenant la nouvelle de la perte de l’arche, et sa belle-fille avec lui. Ikabod ! Plus de gloire.

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Plusieurs siècles plus tard, Jérémie avertira le peuple de Dieu, l’appelant à changer d’attitude pour éviter que Jérusalem ne soit détruite… Le peuple de lui répondre : « Mais nous avons ici le Temple, le Temple de l’Éternel. » (Jr 7.4). Croyances superstitieuses, secours illusoires. On ne se remet pas en cause. Le mal est profond, mais on s’appuie sur des formules toutes faites, des objets fétiches.

Les deux fils d’Héli, les prêtres, nous dit le texte, « piquaient les meilleurs morceaux de viande, et couchaient avec des femmes à l’entrée de la tente de la rencontre » (2.12-18, 22-25). Et pourtant, ils étaient mariés ! Mais ils avaient le coffre sacré, l’arche de l’alliance ! Alors, on peut se comporter comme on veut ! Du moins le croyaient-ils… Et le jugement de Dieu est tombé.

Jésus lui-même n’a pas été tendre envers les religieux de son temps qui, tout en se faisant passer pour pieux, détroussaient les veuves (Mt 23) ! Jean-Baptiste ne disait-il pas : « Produisez du fruit digne de la repentance ! » (Mt 3.8). Ils disent, mais ils ne font pas ! Soyons conséquents dans nos paroles et dans nos actes (cf. 1Jn 3.18).

Dagôn face au Dieu très saint (chapitres 5-6)

Ainsi donc, victoire totale des Philistins et défaite de… Dieu ? Vous vous rendez compte ? L’arche de l’alliance, le symbole de la présence de Dieu, placée dans le temple du grand Dagôn, le dieu de la végétation, le père de Baal ! Dieu en terre étrangère. J’entends les paroles de Paul : « Quelle communion y a-t-il entre la lumière et les ténèbres ? » (2Co 6.14). Dagôn, une statue, et à côté de ce faux dieu l’arche de l’alliance ! Quel déshonneur ! Oui, mais le lendemain matin de cette installation, Dagôn est par terre. On le remet debout ! Le lendemain, le revoilà par terre, et en morceaux !

Les Philistins commencent à se sentir mal. Dieu leur envoie des maladies. Leur cas s’aggrave. C’est la peur. Fait remarquable : le coffre fait le tour de toutes les villes des Philistins et c’est partout le malheur. Le cadeau empoisonné est vite renvoyé chez les Israélites. Sept mois de terreur. Y a-t-il un Dieu vivant chez les Philistins ? Un Dieu protecteur ? Un Dieu qui guérit ? Et toi Israël, peuple de Dieu, connais-tu ce Dieu vivant ? Ce Dieu Tout-Puissant ? Ce Dieu qui guérit ? Les vaches, elles, connaissent la route. En ramenant l’arche elles vont tout droit à Beth-Shémesh. Et les Philistins peuvent dire : « Ce qui nous est arrivé, ce n’était pas un accident, c’était bien la main de Dieu. » (6.9).

En quel Dieu croyons-nous ? Quelle est notre vision de l’Éternel ? Notre Dieu agit souverainement partout. Chez les Philistins. Parmi son peuple. Il y a bien de l’ironie dans ce texte. Les Philistins croyaient avoir pris un magnifique trophée. Mais l’arche du Dieu saint était autre chose. Même les habitants de Beth-Shémesh en feront l’expérience à leurs dépens (6.19-21). Dieu ne se laisse pas mépriser. Ne négligeons pas les choses saintes (Hé 12.16) !

Le chemin du retour (chapitre 7)

Samuel, qui a grandi devant le Seigneur et est devenu prophète en Israël (voir 2.18-26 ; 3.1-4.1), est passé à l’arrière-plan aux chapitres 4 à 6. Il réapparaît au chapitre 7, alors que vingt années sont passées et ont creusé chez les Israélites une aspiration salutaire : « Toute la maison d’Israël soupira après le Seigneur. » (7.2). Les Israélites désiraient se rapprocher du Seigneur, revenir à lui ! Lassitude d’une situation d’oppression par les Philistins ? Besoin profond, intense, de se rapprocher de Dieu, de revenir à lui ? Soif d’une nouvelle vie, d’une nouvelle relation avec Dieu, d’une nouvelle communion avec Dieu ? Soupirer, se rapprocher, gémir, revenir à Dieu ! Belle attitude, belle vision ! Un travail en profondeur a eu lieu dans le cœur des Israélites. Faut-il parler de réveil ? Il se passe quelque chose, et l’avenir du peuple est en jeu.

C’est ici que Samuel intervient ! Tout est dit en un seul verset (7.3). Quelques verbes-clés résument son message ! Premièrement REVENIR de tout cœur au Seigneur. Quel verbe, quel appel : le chemin de la repentance. Que de fois ce verbe apparaît chez les prophètes (Ésaïe, Jérémie, etc) ! Puis ÉCARTEZ les dieux de l’étranger ! Un grand nettoyage est indispensable. Leur cœur est partagé entre Dieu et les dieux des Philistins. Quel comble, mes amis ! Dans toute réforme, notamment au temps des rois de Juda Ézéchias et Josias (2R 18.1-8 ; 22.1-23.30), un grand nettoyage, une grande purification, fut nécessaire. « Nul ne peut servir deux maîtres » (Mt 6.24) dira Jésus. Elie au Carmel l’avait bien compris (1R 18). Troisièmement FIXEZ votre cœur en Yahvé, en l’Éternel ! Ce n’est pas tout de nettoyer, de brûler des idoles, de faire le ménage ! Fixer son cœur sur Dieu, le Seigneur ! Enracinez-vous en lui. Attachez-vous à lui. Votre cœur vacille des deux côtés ? Fixez-le sur Christ, « Fixez vos yeux sur le Christ » (Hé 12.2). En quatrième lieu, ne SERVEZ que lui ! Soupirer, se rapprocher, revenir, écarter, fixer et, désormais, servir le Dieu vivant, votre Dieu. Et lui seul. Jésus n’a pas dit autre chose à Satan qui le tentait : « C’est le Seigneur ton Dieu que tu adoreras, et à lui seul que tu rendras un culte. » (Mt 4.10). « Alors le Seigneur vous DÉLIVRERA de la main des Philistins. » (7.3). L’espérance ! Dieu est fidèle pour qui s’attache à lui !

Le programme de l’homme de Dieu est fort, radical, et inhabituellement suivi de conséquences : « Les Israélites supprimèrent donc les Baals et les Astartés et ne servirent que le Seigneur. » (7.4). Un message reçu, un message mis en pratique. Extraordinaire ! Mais il y a un sixième verbe : « Rassemblez tout Israël et je PRIERAI le Seigneur en votre faveur. » (7.5). Encore l’importance de la prière ! Et le peuple de dire : « Nous avons péché contre le Seigneur ! » (7.6). Quel changement en profondeur dans ce peuple !

Le temps du changement est aussi souvent celui des luttes, des épreuves : « Les Philistins montèrent contre Israël ! » (v. 7). Mais, Seigneur, nous avons tout mis en règle ! Et voilà que cela recommence ! « Le peuple de Dieu eut peur. Il dit à Samuel : Ne reste pas muet en nous abandonnant. Crie vers le Seigneur notre Dieu, pour qu’il nous délivre des Philistins ! » (7.8). Bon réflexe ! « Samuel cria vers le Seigneur, et le Seigneur lui répondit […] Le Seigneur tonna à grand fracas, il les frappa … » (7.9-10). Les Philistins furent battus. Il y eut paix en Israël !.

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Dieu nous a secourus !

Pour commémorer cette victoire totale de Dieu sur les Philistins, Samuel prit une pierre et la dressa : « Il lui donna le nom d’Eben-Ezer, en disant : Jusqu’ici, le Seigneur nous a secourus. » (7.12). Marquer ce jour glorieux d’une pierre blanche, comme on dit ! La pierre du secours. Aucune valeur en elle-même. Mais Dieu nous a secourus. Oui, le peuple d’Israël avait soif de revenir à son Dieu, de le servir lui seul. Oui, il a fallu se séparer de certains « trésors », de faux dieux qui ne peuvent ni entendre, ni voir, ni sauver ! Mais Dieu est intervenu, Dieu a agi, Dieu a délivré, Dieu a secouru ! Il faut s’en souvenir !

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Des siècles plus tard, ce n’est pas une pierre qui a été dressée à Jérusalem. C’est une croix, sur le Mont Golgotha ! Fixez votre regard sur cette croix. C’est Jésus, l’innocent, le Saint, le Juste que l’on crucifie. Le Christ s’offre lui-même pour nous débarrasser de tous nos faux dieux, de tous nos péchés, de notre inconstance, de nos tiraillements. Par sa mort sur la croix, il nous relève, il nous pardonne, il nous donne la vie, la paix, la vraie délivrance du plus terrible des Philistins : le péché. Car, il est ressuscité. Il s’est relevé d’entre les morts. Il vit !

Église de Jésus-Christ, peuple de Dieu ! Plus de coffre sacré, plus d’arche de l’alliance, plus de Samuel. Mais nous avons bien plus ! Nous avons la Bible ! Le message de la grâce de Dieu, le témoignage de son intervention à travers les âges. Nous avons Jésus-Christ. Quel intercesseur ! Dans nos luttes, nos peines, nos combats, nous pouvons crier à Jésus comme le peuple à Samuel : « Seigneur Jésus, ne reste pas muet… Intercède. » Jésus nous répond : « Je prierai Dieu le Père en votre faveur » ! (Rm 8.34). Et nous avons, nous croyants, ce cadeau inestimable : le Saint-Esprit ! Il nous éclaire, il nous guide, il nous révèle toute la Parole de Dieu, il est là, chaque jour. « Laissez l’Esprit diriger toute votre vie. » (Ga 5.16-26, Ep 5.18).

« Dieu ne désire pas nous guider de façon magique. Il veut que nous connaissions sa façon de penser, d’aimer. Nous devons être imprégnés du contenu de l’Écriture, de ses conceptions et de ses principes, et être sensibles à l’action du Saint-Esprit afin de prendre instinctivement la bonne direction en toutes circonstances. » (Blaine Smith, Parole et Textes 2019).

Nous avançons ensemble, nous prions ensemble, nous adorons ensemble, nous écoutons la Parole ensemble, nous servons le Seigneur ensemble… La route est parfois longue. Oui, mais quand on fixe son cœur sur le Seigneur, qu’on le sert de tout son cœur… Dieu est là, le Christ est là : des réponses aux prières, des portes qui s’ouvrent. Dieu prend soin de son Église. Il est fidèle ! Fixez votre cœur sur le Seigneur ! Dieu nous a secourus ! ■

Article paru dans :

juin 2019

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