PAR : Anne Kohler
Équipière de Jeunesse pour Christ, présidente du conseil d’Église, Église La Bonne Nouvelle, Saint-Louis.

Article paru dans :
Rubrique :
Société
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Lucas, Lindsay, Nicolas, Émilie… Ces prénoms ont tragiquement fait la une de l’actualité ces dernières années : chacun de ces adolescents s’est donné la mort suite à une situation de harcèlement. De nombreux outils ont été mis en place au cours de ces dernières années, en matière de prévention et de sensibilisation, mais il reste encore des efforts à fournir pour réduire la fréquence de ces drames.

En France, près d’un million d’enfants vivent actuellement une situation de harcèlement à l’école(1) (soit un enfant sur dix), et vingt pour cent des jeunes affirment avoir déjà été confrontés à une situation de cyberharcèlement(2). Chiffre également intéressant : près d’un jeune sur quatre reconnaît avoir commis des cyberviolences(3). Il est fort probable qu’au sein de nos assemblées se trouvent des jeunes en souffrance et confrontés au phénomène du harcèlement. L’apôtre Paul nous exhorte à porter les fardeaux les uns des autres (Ga 6.2). Et si un premier pas pour leur venir en aide était de s’intéresser davantage à ce fléau, qualifié de priorité nationale par le gouvernement français ?

Définitions

Le harcèlement scolaire est une violence qui prend plusieurs formes : insultes, rumeurs, intimidations physiques ou morales. Elle se manifeste de manière verbale, physique, morale ou à caractère sexuel, et se caractérise par :

  • Un rapport de force et de domination qui s’installe entre un ou plusieurs élèves et une ou plusieurs victimes ;
  • Une notion de répétitivité (différentes formes d’agression se répétant régulièrement sur une plus ou moins longue période) ;
  • La volonté délibérée de nuire à la victime, avec une absence d’empathie de la part de ses auteurs.

Le harcèlement peut se manifester au sein de l’école ou de l’établissement, à ses abords, sur le trajet ou dans les transports. Il peut aussi survenir dans la sphère privée par des appels ou des messages téléphoniques, des SMS ou d’autres messageries, des réseaux sociaux. On parle alors de cyberharcèlement(1). Celui-ci présente quelques particularités : il peut être commis de manière anonyme et prendre une ampleur exceptionnelle, et laisse des traces numériques dans la durée.

Jeune isolé à l'école

Les risques de survenue de ces situations sont plus fréquents à la fin de l’école primaire et au collège : c’est une période particulièrement sensible dans la construction de l’identité des adolescents, ce qui explique notamment une vulnérabilité accrue face à ces attaques.

Symptômes

Fatigue, perte d’appétit ou de poids, repli sur soi, accès de colère, comportements perturbés, douleurs abdominales, décrochage scolaire : voici de nombreux signes qui peuvent nous alerter face à un adolescent qui semblait aller bien jusque-là. Soyons attentifs !

Comment réagir en tant qu’adulte ?

Seule une très faible minorité des jeunes victimes de cyberharcèlement ose en parler à ses parents(4). Ils éprouvent de la honte, de l’incompréhension, de la peur, et se retrouvent ainsi isolés et impuissants face aux menaces rencontrées. Jean-Louis Lafont, thérapeute, formateur, conférencier, nous encourage à poser cette question aux jeunes chez qui nous suspectons une situation de harcèlement(5) : « As-tu déjà été victime ou témoin de violence ? »

Il est crucial d’amorcer le dialogue avec eux : le silence ne fait que protéger les agresseurs, alors que la parole libère ! Notre rôle en tant qu’adulte est de parler avec eux, de les rassurer et de les protéger. Ne minimisons pas leur vécu, ne réduisons pas ces souffrances à de simples blagues ou malentendus.

Créons un espace de confiance et de connexion avec les jeunes de notre entourage. Posons régulièrement des questions sur leur quotidien, leurs amitiés, leurs préoccupations. Rendons-nous disponibles, accordons-leur du temps. Soyons vulnérables et authentiques, parlons de nos propres expériences.

Si le jeune s’ouvre et que nous identifions avec lui une situation de harcèlement (qu’il soit harcelé, harceleur ou témoin), il ne faut surtout pas rester isolés. Assurons-le de notre présence à ses côtés tout au long de la procédure, et agissons tôt afin d’éviter une escalade de la violence.

Quelques pistes :

  • Contacter le professeur principal, le chef de l’établissement scolaire ou une association de parents d’élèves, et s’entourer de personnes compétentes ;
  • Définir un plan d’action avec le jeune à partir des démarches et protocoles mis en place dans les établissements scolaires (programme pHARe(1)) ;
  • Contacter le 3018 pour obtenir des renseignements ou signaler une situation de harcèlement ;
  • Collecter des preuves du harcèlement, signaler les contenus en ligne et porter plainte.

Peut-on éviter d’en arriver là ?

Dès l’enfance, nous pouvons apprendre aux plus jeunes à identifier leurs propres émotions et à développer leur empathie. Sensibilisons-les à l’entraide, à la solidarité : de nombreux cas de harcèlement pourraient certainement être évités s’il n’y avait pas de « suiveurs » ou de public passif…

Par rapport au cyberharcèlement, apprenons et rappelons régulièrement aux enfants et aux jeunes les principes de base sur internet (âge minimum, confidentialité, respect de la vie privée…). Fixons des règles d’utilisation des écrans.

Sensibilisons-les à la problématique du harcèlement qui n’est jamais acceptable ; saisissons les opportunités du quotidien pour aborder ce sujet avec eux. Rappelons-leur que le harcèlement est interdit par la loi et peut être puni sévèrement.

Prions !

Que Dieu nous utilise comme des instruments de paix et de libération (Jé 22.3). Que Dieu restaure les jeunes en souffrance (Ps 35.19). Que Dieu nous aide à chercher le bien de tous, même des harceleurs (Ro 12.14). Que Dieu soutienne les familles dans l’éducation de leurs enfants (De 6.6-7).


(1) « Qu’est-ce que le harcèlement », Ministère de l’éducation nationale et de la jeunesse, education.gouv.fr.

(2) Infographie – Audirep 2021.

(3) « Violence et harcèlement à l’école : rapport sur la situation dans le monde », Unesco, unesdoc.unesco.org.

(4) « Internet : le péril jeune ? », rapport d’avril 2020, Institut Montaigne, institutmontaigne.org.

(5) « Harcèlement : briser le silence » avec Jean-Louis Lafont, podcast du 1er mars 2023, programme Legacy de Jeunesse pour Christ, legacy.jpcfrance.com/podcast.

Article paru dans :

janvier 2024

Rubrique :
Société
Mots-clés :
Association baptiste

Échos du conseil 01.2024

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